La biodiversité des abeilles au sein des vergers entourés de terres agricoles est beaucoup plus faible que dans les vergers entourés de terres sauvages. Un constat qui n’est pas sans conséquence pour les cultures.
Les abeilles ne sont plus les bienvenus dans les campagnes. Le constat, connu depuis de nombreuses années, n’en est pas moins désolant et dramatique. Une nouvelle étude menée par Heather Grab du département d’entomologie de l’Université de Cornell dans l’état de New York (Science 17 janvier 2019) apporte un nouvel éclairage sur les conséquences de cette extinction de masse. Heather Grab et son équipe se sont particulièrement intéressées aux cultures de pommes dans l’Etat de New York. Ils ont analysé des données recueillies sur une dizaine d’années d’observation: le nombre d’espèces y est en constante diminution et d’un point de vue morphologique les abeilles se ressemblent de plus en plus. Un appauvrissement qui n’est pas sans conséquences.
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Depuis des millions d’années les pollinisateurs n’ont cessé de se diversifier. Le nombre d’espèces est devenu de plus en plus important. L’équipe d’Heather Grab a examiné comment l’activité agricole avait joué sur la perte de diversité dans les communautés de pollinisateurs dans 27 vergers de pommiers dans l’État de New York. «En milieu rural les abeilles et les autres pollinisateurs sont doublement pénalisés», explique Isabelle Dajoz, professeur d’écologie à l’université Paris-Diderot. «Les pesticides fragilisent leur organisme et sont néfastes à la diversité de la flore. Certaines espèces ne peuvent pas survivre car elles n’ont plus de nourriture.» Dans certains vergers, le nombre d’espèces a été réduit de moitié. Les chercheurs estiment que la diversité des insectes perd 35 millions d’années d’histoire de l’évolution pour chaque augmentation de 10% de la couverture agricole dans le paysage. C’est au total un bond de 230 millions d’années en arrière.
Des conséquences pour l’agriculture
Les espèces d’abeilles qui visitent les vergers entourés de terres agricoles sont toutes apparentées. Au lieu de continuer de se diversifier, la morphologie des espèces se rapproche. Les conséquences ne sont pas seulement graves pour les populations d’abeilles, mais aussi sur les cultures elles-mêmes. Les insectes ont besoin des plantes pour se nourrir, les plantes ont besoin des insectes pour se nourrir. Et comme tous les insectes ne butinent pas les mêmes plantes, la diversité des uns favorise celle des autres. Plus le nombre d’espèces de plantes disponibles est élevé, plus le nombre d’espèces de pollinisateurs sera élevé.
«Cette étude démontre que les conséquences de la perte de la biodiversité sont aussi très graves sur des monocultures», analyse Axel Decourtye, directeur scientifique de l’Institut de l’abeille (Avignon). «Les pommes new-yorkaises grandissent d’autant moins bien que la diversité des espèces est réduite.» Plus les pommiers se situent dans des zones riches en biodiversité plus la taille et le poids des pommes augmentent et plus le nombre de pommes mal formées diminue.